Gerasa, cité romaine
Jeudi 15 novembre 2018 - Le temps est beau, aussi nous en profitons pour aller à 48 km d’Amman sur l'un des sites d'architecture Romaine le plus grand et le mieux préservé au monde. C’est aussi la plus grande ville gréco-romaine sur les 14 que possède la Jordanie.
Appelée Gérasa par les Romains, la ville devient en arabe Jerash ou encore Jarash, qui signifie "La rivière dorée".
La ville moderne de Jérash s'est établie autour du site de l'antique cité de Gérasa. Elle a pris une extension très rapide due à l'immigration intérieure mais aussi à l'arrivée de nombreux réfugiés palestiniens.
Gérasa aurait été fondée à la fin du IVe siècle avant J.-C. par Alexandre le Grand. Détruite puis reconstruite, elle fut pillée par les Perses puis les Arabes et en partie détruite par un tremblement de terre en 749. Elle fut à nouveau reconstruite puis dévastée par les affrontements entre musulmans et croisés au cours desquels le temple d’Artemis fut transformé en forteresse par les Arabes.
Les premières fouilles furent effectuées dans les années 1920-1930 par une équipe universitaire américano-britannique. Elles seront reprises véritablement dans les années 1980, notamment sous la forme d'un projet de coopération internationale, faisant appel à des archéologues du monde entier, le Jerash Archaeological Project. Chaque équipe se vit attribuer une portion du site à fouiller et à rénover. L'équipe française, dirigée par Jacques Seigne, s'occupe encore aujourd'hui de la rénovation du sanctuaire de Zeus.
Un grand nombre de monuments ont été dégagés et souvent, reconstitués :
L'Arc d'Hadrien fut construit à l'entrée sud de la ville pour honorer la visite de l'empereur Hadrien en l’an 129. Il a été reconstitué après 1980 par des archéologues jordaniens.
Particularité : la couronne de feuilles d'acanthe sculptée au-dessus des bases des piliers. Ph. Delahaye.
Une fois franchi l’Arc d’Hadrien, nous passons devant l’Église de Marianos, du nom d’un évêque alors que Jerash était un épiscopat. Construite en 570 après J.-C. elle fut détruite par le tremblement de terre de 749. Des pavements de mosaïques à dessins géométriques remarquablement conservés montrent la richesse du décor intérieur des églises de l’époque byzantine.
Nous arrivons à la Porte Sud qui s’ouvre dans le mur d’enceinte de la ville.
La Porte Sud est un arc monumental qui marque aujourd’hui l’accès principal au site de Gerasa. Avec ses trois baies encadrées de demi-colonnes d’ordre corinthien, elle ressemble beaucoup à l’Arc d’Hadrien. Elle fut intégrée dans le rempart de 3,4 km de longueur construit au début du IVe siècle après qu’un groupe de pillards incendia et détruisit une grande partie de la ville.
Mur des fortifications et petit casernement militaire contrôlant l’accès aux fortifications. Début IVe siècle-VIIe siècle après J.-C. Ph. Delahaye.
Tout à côté le Théâtre Sud. C’est le plus ancien et le plus grand des théâtres du site qui ont été remarquablement bien restaurés et accueillent des spectacles locaux, généralement en période estivale.
Le théâtre Sud, vers 90-749 après J.-C. puis vers le XIIe siècle. La scène avec les portes d'entrée pour l'orchestre. Ph. Delahaye.
Près du théâtre, le Temple de Zeus construit en 162 après J.-C. sur les ruines de précédents sites sacrés.
Du temple de Zeus, on a une vue imprenable sur la Place ovale. Ce magnifique forum est emblématique de l’ancienne cité de Gerasa par son architecture, son décor et surtout sa taille et sa forme. C'est un élément architectural essentiel de l'urbanisme de la ville puisqu'il permet de faire la jonction visuelle entre le Cardo maximus (rue principale de Gerasa) et le sanctuaire de Zeus
Les colonnes ioniques qui la bordent datent du IIe siècle, du temps de l’empereur Trajan, tandis que son magnifique dallage serait du IVe siècle.
Nous arrivons à l’Église Saint-Théodore. Au IVe siècle, la communauté chrétienne était nombreuse et on a retrouvé les traces de treize églises aux sols recouverts de mosaïques, dont une cathédrale et à côté de celle-ci l’église Saint-Théodore. On a retrouvé également les restes d'une synagogue de la même époque, située au nord-ouest du sanctuaire d'Artémis.
Nous continuons à remonter le site vers le Temple d’Artemis et le Théâtre Nord.
Le Temple d’Artemis entretenait avec le Temple de Zeus une rivalité entre les fidèles de chacune des deux divinités. Artemis, fille de Zeus et sœur d'Apollon, était la déesse protectrice de Gerasa. Son temple était un lieu de sacrifices dont l'intérieur était à l'origine plaqué de dalles de marbre et abritait un sanctuaire qui contenait probablement une statue de la déesse.
Artemis a donné son nom à une plante que nous connaissons bien : l’Artemisia absinthium ou grande absinthe. Quel est le lien entre Artemis, les femmes qu’elle protège et l’absinthe ? Artemis est la déesse de la lune dont les cycles de 28 jours correspondent aux cycles féminins. De plus, elle délivre les femmes de l’atteinte de l’homme tout comme la grande absinthe utilisée au XIXe siècle pour ses propriétés abortives.
J’en profite pour rappeler ici que j’ai déposé en 1990 le nom d’Artémisophiles pour désigner les collectionneurs du thème absinthe.
Le Temple d'Artemis, 135-749 après J.-C. Le monument est resté inachevé. Seules 12 des colonnes corinthiennes furent dressées sur les 32 qui étaient prévues. Ph. Delahaye.
Tout à côté du Temple d’Artemis, le Théâtre Nord. Le théâtre n'avait à l'origine que 14 rangées de sièges et était utilisé comme salle du conseil de la ville. Les noms des tribus représentées au conseil sont inscrits en grec sur certains des sièges. Il fut agrandi et sa taille a doublé avec une capacité de 1.600 personnes. Les spectateurs pénétraient dans le théâtre par des passages situés au-dessus des rangées de sièges.
Belle vue depuis le théâtre sur le Tétrapylon Nord. Tetrapylon signifie en grec "quatre portes". Il se trouve à l’intersection du Cardo (rue principale) et de la première rue transversale. Quatre pilastres formaient la base d’un monument central.
Retour vers l’entrée Sud par la rue principale, le Cardo Maximus ou rue à colonnades, long de 800 mètres. Encore pavé de pierres d'origine, les ornières faite par les roues des chars sont encore visibles.
Cette rue à colonnades fut remodelée à la fin du IIe siècle de notre ère, probablement après 170. Les colonnes ioniques furent remplacées par des colonnes corinthiennes plus élaborées.
Sur toute la longueur du Cardo, des trous réguliers de chaque côté de la rue drainaient l'eau de pluie dans des égouts.
De chaque côté du Cardo, un large trottoir était occupé par des artisans et marchands de toutes sortes installés entre les entrées des monuments publics. Parmi eux le Macellum, ou marché, probablement le plus beau monument de la ville, était un lieu central pour le commerce.
Le Macellum s’orne d’un Nympheum, ornement de fontaine dédié aux nymphes. Ces fontaines étaient fréquentes dans les villes Romaines pour fournir des points de rafraîchissement à la population.
Tout au long du Cardo qui nous ramène à la Porte Sud, nous admirons les pierres sculptées posées à terre.
Difficile de tout voir et surtout tout comprendre quand on n’est pas archéologue. Personnellement, je n’ai pas fait attention à la Cathédrale, temple romain probablement dédié à l’origine à Dyonisos et sur lequel fut construite une église byzantine, aujourd’hui appelée la Cathédrale. De même, je n’ai pas vu les bains. Mais comment se repérer au milieu des 1300 colonnes de ce site extraordinaire !
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