Antique Vin d'Absinthe du XVIIIe siècle
Les propriétés médicinales de la grande absinthe (Artemisia absinthium) sont connues depuis l'Antiquité. Grecs et Romains la prescrivaient notamment pour ses propriétés apéritives et digestives. Dans ce cas, elle était surtout proposée sous forme de Vin d'Absinthe.
L'amertume de la plante se retrouve intégralement dans le Vin d'Absinthe qui n'est pas obtenu par distillation, qui élimine tout ce qui est acide ou amer, mais par simple macération dans de l'eau-de-vie puis du vin blanc. C'est cette amertume qui déclenche la sécrétion biliaire et soulage ainsi les embarras digestifs.
Lors d'une vente aux enchères, Claude Durand, collectionneur que l'on ne présente plus, a acquis deux bouteilles pleines de Vin d'Absinthe antérieures à 1777, provenant des caves d'un château de Bourgogne.
Les deux seuls exemplaires connus de bouteilles de Vin d'Absinthe, antérieures à 1777. Coll. Durand.
Pourquoi peut-on affirmer que ces bouteilles pleines sont antérieures à 1777 ?
Sans s'étendre sur les bouteilles qui sont soufflées, ce sont les étiquettes aux serpents entrelacés qui donnent l'information principale. On peut y lire CADET Apothicaire Rue St Honoré N° 108 à Paris.
Or, c'est en 1777 qu'un décret de Louis XVI stipula que les Apothicaires seront désormais des Pharmaciens. Un Collège Royal de Pharmacie est créé et des cours publics institués. Seuls les Maîtres en Pharmacie dûment diplômés sont autorisés à préparer et délivrer les médicaments au public. Les épiciers, jadis appartenant à la même catégorie que les apothicaires et les membres des communautés religieuses s'en voient interdits.
La loi du 21 germinal an XI (11 avril 1803) régit l'exercice de la pharmacie et le mot Apothicaire disparaît totalement des textes.
Un détail intéressant sur l'étiquette : les serpents
Les apothicaires puis les pharmaciens prirent pour emblème le serpent. Par sa morsure venimeuse, le serpent personnifie la mort mais par sa mue annuelle, il signifie aussi guérison, renouveau et vie. Le serpent symbolise également discrétion, prudence et vigilance, des qualités nécessaires à l'exercice de la pharmacie et de la médecine. (recherches effectuées par Claude Durand)
Sur l'étiquette, on peut lire Wermouth, signifiant par là qu'il s'agit d'un breuvage amer et Vin d'Absinthe de table. Coll. Durand.
Qui était Antoine-Alexis Cadet, Apothicaire à Paris ?
Antoine-Alexis Cadet (1743-1828) est le dernier d'une famille de treize enfants. Devenus très tôt orphelins, ils seront placés en nourrice. Pour se distinguer les uns des autres, les sept garçons ajouteront à leur nom celui du lieu où ils avaient été élevés en nourrice. D'où le nom d'Antoine-Alexis Cadet de Vaux.
Apprenti chez le célèbre apothicaire M. de Chamousset dont les idées et la pratique le marquèrent, il étudia la chimie. En 1759, il remplaça son frère à l'Hôtel Royal des Invalides comme Apothicaire-Major "gagnant-maîtrise". Nanti de son brevet six ans plus tard, il ne quitta les Invalides qu'en 1766, remplacé par Parmentier. Il refusait alors de s'installer car ne voulant pas appartenir à une corporation assimilée à celle des épiciers. Finalement, il devient propriétaire d'une officine à Paris en 1769 et s'installe comme Apothicaire.
Antoine-Alexis Cadet de Vaux abandonna rapidement la préparation des médicaments. Il vend son officine pour fonder la première feuille quotidienne "Le Journal de Paris" dont le premier numéro parut en 1777.
Cadet s'intéressa aux applications de la chimie à l'économie rurale et domestique et remarqua la nocivité des comptoirs revêtus de plomb des marchands de vin et des balances de cuivres recouvertes de vert de gris. Sur son insistance une déclaration Royale prohiba ces métaux pour de tels usages. Cadet devint en 1785 Inspecteur général des objets de salubrité et se démena pour faire fermer le cimetière des Innocents qui infestait tout un quartier de Paris.
Vers 1772, il créa avec Parmentier la première école de boulangerie gratuite et contribua avec lui au développement de la culture de la pomme de terre.
Cadet acquiert en 1788 le château de Franconville situé à une quinzaine de kilomètres d'Auvers-sur-Oise. Il y publie ses travaux de recherche d'utilité générale. (Sources : Dictionnaire des Journalistes, notice de Nicole Brondel et Société d'Histoire de la pharmacie).
Toujours dans cette demeure acquise par Antoine-Alexis Cadet, une des rares glacières encore visibles. Liées aux châteaux, les glacières étaient destinées à conserver en toute saison la glace et la neige durcie amassées pendant l'hiver. Ce sont des réservoirs enterrés aux trois quarts sous un monticule, généralement arboré. L'entrée se fait par un sas.