Pyrogènes en émaux de Longwy

Publié le par Marie-Claude DELAHAYE

Dans la catégorie "Absinthe", les pyrogènes en émaux de Longwy, publicitaires de la marque  Mugnier de Dijon, sont parmi les plus beaux et les plus rares.

La petite ville de Longwy, située en Lorraine, tient sa renommée de sa faïencerie et plus précisément de ses émaux très vite connus dans toute l'Europe. Fondée en 1798 par Charles Régnier, la faïencerie avait pour ambition initiale de fabriquer de la faïence fine utilitaire. Charles Régnier arrive à maintenir la fabrique tant bien que mal malgré la commande de services de table pour les Maisons d'éducation de la Légion d'Honneur par l'empereur Napoléon 1er. Finalement, il passe la main en 1816 et vend la faïencerie au baron belge Antoine de Nothomb. Son épouse est la fille de Pierre-Joseph Boch lui même faïencier, ancêtre de la dynastie Villeroy et Boch. Leur fille Fanny de Nothomb épouse en 1832 un autre baron belge : Henri-Joseph d’Huart, sidérurgiste à Longwy. En 1835, à la mort d’Antoine de Nothomb, la faïencerie entre dans la famille d’Huart. Elle le restera 150 ans. 

La faïencerie à Longwy en 1900.

La faïencerie à Longwy en 1900.

En 1866, les deux fils de Henri-Joseph, Ferdinand et Hippolyte d’Huart frais émoulus de l'Ecole Centrale de Paris prennent la direction de la manufacture. Jusqu'au début des années 1870, ils gèrent la fabrique sans s'affranchir réellement de l'influence paternelle. Mais en 1872, en réponse à l'engouement des Français pour les produits cloisonnés venus d’Extrême-Orient, ils font venir de  Paris le céramiste Charles Longuet qui va introduire vers 1874,  le procédé dit "des émaux en relief à décor cerné" qui deviendront la caractéristique de Longwy. À la bonne surprise générale, les émaux de Longwy obtiennent une Médaille d'or à l'Exposition universelle de Paris en 1878. Cette reconnaissance inattendue va être le début d'une grande popularité et de nombreux artistes vont collaborer avec la faëncerie et développer sa notoriété. 

Cette technique délicate des émaux qui consiste à imprimer le décor en noir sur le biscuit brut, puis à remplir goutte à goutte chaque alvéole ainsi cernée avec un émail coloré va passer du stade artisanal au stade industriel sous l'impulsion de l’italien Amédée de Caranza qui dirigea les usines de céramique de l’Empereur du Japon.

Pyrogènes en émaux de Longwy

Les raisons du succès tiennent en trois mots : bleu, cerne et craquelure.

Le bleu fut mis au point par le futur directeur de la Manufacture de Sèvres, Théodore Beck dans les années 1850. Charles Longuet qui avait travaillé avec Beck, l'adapta et l'imposa à Longwy. Le cerné revient au faïencier parisien Collinot dans les années 1860. Ce trait autour des émaux à la manière des céramiques orientales permet d'en souligner les couleurs. Longwy va exploiter l'idée industriellement en imprimant les cernés directement sur le biscuit. Quant aux craquelures, la faïencerie en fait un élément décoratif et non plus un défaut en les teintant à l'oxyde de fer ou à l'encre de Chine à la sortie du four. 

Pyrogènes en Longwy pour l'absinthe Mugnier à Dijon. Fin XIXe siècle.Collection Roussel.
Pyrogènes en Longwy pour l'absinthe Mugnier à Dijon. Fin XIXe siècle.Collection Roussel.

Pyrogènes en Longwy pour l'absinthe Mugnier à Dijon. Fin XIXe siècle.Collection Roussel.

Contrairement aux caractéristiques principales des émaux de Longwy où le bleu domine, c'est ici le vert qui prend le pas. Peut-être à la demande de la Maison Mugnier qui souhaite rester dans le ton de l'absinthe. Le cerné est présent ainsi que le décor à tendance florale entourant la médaille de récompense qui revient sur tous les pyrogènes de la marque, tel un logo. Au recto, le nom du distillateur et celui du produit dont on veut faire la promotion. 

Variantes avec le pyrogène précédent sur le ruban de la médaille et sur le rebord à proximité du grattoir. Collection Delahaye.
Variantes avec le pyrogène précédent sur le ruban de la médaille et sur le rebord à proximité du grattoir. Collection Delahaye.

Variantes avec le pyrogène précédent sur le ruban de la médaille et sur le rebord à proximité du grattoir. Collection Delahaye.

La maison Mugnier a fait faire de nombreux pyrogènes à sa marque. Beaucoup font la publicité de l'absinthe mais d'autres servent de support aux autres produits Mugnier. On ne retiendra que ceux fabriqués à Longwy. Si le principe est toujours le même, les couleurs sont différentes suivant les liqueurs proposées.

Collection privée.Collection privée.

Collection privée.

Collection privée.Collection privée.

Collection privée.

Collection privée.Collection privée.

Collection privée.

Collection privée.

Collection privée.

En marge de sa production artistique, Longwy réalisera des pièces commémoratives  ainsi que de nombreuses créations publicitaires, notamment des cendriers dans les années 1950 à 1970. Puis connaissant de grandes difficultés, l'entreprise fermera ses portes en 1977. En cédant cependant l'héritage artistique à plusieurs sociétés nouvelles, toujours implantées à Longwy ce qui n'est pas sans susciter quelque méfiance au moment d’un achat. 

Source : "200 ans d'histoires et de créations Faïences et Emaux de Longwy 1798-1998" édité par l'association patrimoine du pays de longwy. Brochure commerciale de présentation des Emaux de Longwy. A. Dreyfus"

Pyrogène non publicitaire. Collection privée. Année de fabrication inconnue.

Pyrogène non publicitaire. Collection privée. Année de fabrication inconnue.

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